Existe-t-il une personnalité juridique propre au droit pénal ?

Le droit pénal s’intéresse de près à la personnalité juridique et à ses vecteurs, les personnes : qu’il s’agisse d’en faire une condition de la protection pénale ou de l’action publique, la personnalité joue clairement un rôle fondamental. Demeure la question posée par l’organisateur de ce beau colloque : la personnalité juridique à laquelle nous faisons allusion est-elle propre au droit pénal ?

Inutile de maintenir le suspense : la réponse semble négative.

L’autonomie est en effet évincée quand on songe au sort réservé aux enfants à naître. La personnalité juridique à laquelle recourt la Cour de cassation pour résoudre la problématique de l’existence juridique en droit pénal est indiscutablement celle que l’on retrouve classiquement en droit civil. Les solutions dégagées en matière de fusion absorption participent également d’une souscription sans nuance à la personnalité juridique développée en droit civil.

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Les Sages et la garde à vue : esquisse d’un flot négatif

L’histoire du droit est également faite de bruit et de fureur. Au cours des dernières années, la garde à vue a incontestablement servi d’étendard aux pourfendeurs des droits de la défense. Bien que l’avocat soit parvenu aux termes de la loi du 4 janvier 1993, à pénétrer dans les commissariats, le rôle du barreau a toujours été soigneusement limité par la législation française. Du très court entretien confidentiel jusqu’à la périodicité des visites, tout était fait afin que l’illusion de défense pénale soit assurée tout en garantissant la frustration des avocats. La houle européenne initiée par l’arrêt Salduz raviva la flamme de ceux qui étaient largement restés sur leur faim après la loi du 15 juin 2000. L’onde se propagea assez rapidement au sein de la Cour puisque furent très rapidement condamnés, après la Turquie, et pour les mêmes motifs, Ukraine, Pologne et Russie. La France était dès lors en sursis, l’onde s’étant transformée en un raz de marée. La très opportune question prioritaire de constitutionnalité a dès lors permis aux Sages de la rue de Montpensier de devancer Strasbourg de quelques mois.

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Le contenu de la réforme de l’audition libre opérée par la loi du 27 mai 2014

La loi du 27 mai 2014 a régi le feu sans la glace afin de donner un cadre juridique à l’audition libre d’un suspect. Désormais, la procédure pénale permet donc de suspecter sans contraindre, au bénéfice des droits de la défense, mais également de contraindre sans suspecter, voire de suspecter et contraindre un individu.
La loi du 27 mai 2014 a ainsi introduit dans le code de procédure pénale un article 61-1 aux termes duquel un suspect, i.e une personne à l’égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction, peut être entendue librement sur ces faits. A côté de la contraignante garde à vue, existe donc un régime permettant d’entendre librement un individu soupçonné d’avoir commis une infraction. Ce faisant la loi complète encore un peu plus le statut du suspect qui, jusque-là bénéficiait d’un régime légal exclusivement ou presque lié à la garde à vue, ou à la mise en examen.

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Le contenu de la réforme de la garde à vue opérée par la loi du 14 avril 2011

La garde à vue française présentait il y a quelques mois des similitudes avec la situation d’un héros shakespearien :  le duc de Glamis, plus connu sous le nom de Macbeth.  Alors qu’il se promenait sur la lande à l’issue de la guerre remportée face à l’Irlande et à la Norvège, Macbeth fit avec son ami Banquo une rencontre aussi surprenante qu’inquiétante : trois sœurs fatales (plus tard décrites comme des sorcières) lui prédirent qu’il deviendrait roi d’Ecosse. Transposée en matière de garde à vue, la pièce shakespearienne mettrait aux prises cette mesure de contrainte policière et les Trois sœurs fatales que sont la Cour européenne des droits de l’homme, la chambre criminelle, le Conseil constitutionnel.

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La CNCTR : vivre et laisser mourir le contrôle du renseignement ?

Créée par la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) ne manque pas d’interroger. Si son rapport d’activités publié en décembre 2016 permet de lever le voile sur son activité, la conventionalité de sa mission de contrôle apparaît toutefois incertaine au regard des critères dégagés par la Cour européenne des droits de l’homme.

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Victime et Conseil de l’Europe : chronique d’un faux-semblant ?

Si les droits de la victime pénale ont fait l’objet de nombreuses consécrations en droit européen au cours des 30 dernières années, l’on ne saurait occulter que l’action par laquelle elle est à même faire valoir ces droits devant une juridiction répressive a sensiblement troublé la Cour européenne écartelée entre les différents systèmes répressifs que comprend le continent européen. Le statut de la victime d’une infraction est donc à géométrie variable, les différentes instances hésitant à consacrer l’action de cette victime à la fois civile et pénale.

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Lutte contre les discriminations et valorisation des identités

Il faut savoir reconnaître le mérite de ceux qui œuvrent, souvent en silence, pour que les injustices subies le plus souvent par les plus démunis soient corrigées, voire punies. Cela est d’autant plus vrai à l’université où les questions juridiques sont essentiellement théoriques, les idéologues du droit se battant souvent par chronique interposée en se souciant peu de l’efficience de leurs bravades… L’institution du Défenseur des droits participe de cette logique d’effectivité du droit au nom de l’égalité, peut être réelle, mais pas seulement. Une simple lecture de son périmètre d’intervention donne rapidement le tournis. L’office de cette institution est des plus nobles. Malgré les efforts fournis et les succès empilés, il y a de quoi rester sceptique quand une agence immobilière publie une annonce excluant de l’offre locative « les Noirs ». 

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Dessine-moi un terroriste

Depuis plusieurs mois la France vit au rythme d’une épidémie : cluster, gestes barrières, confinement, masque et réanimation ont pénétré le quotidien existentiel et discursif des Français. Alors que le port du masque s’imposait progressivement, nous perdions sensiblement l’habitude des palpations et autres fouilles de sac à l’entrée des lieux publics. Las, si les exigences Vigipirate s’éclipsaient dans le halo d’un virus, s’ouvrait en septembre à Paris le procès des attentats de janvier 2015. Et cette actualité judiciaire de nous rappeler que le microbiote d’une chauve-souris n’est pas la seule menace qui nous guette quand bien-même avancerions-nous masqués. Ce dur retour à la réalité invite à interroger la rapidité avec laquelle le risque sanitaire a presque réussi à occulter le danger djihadiste…

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La vanité des bûchers

Au commencement, il y eut la volonté d’interroger la parole des juristes. Leur prétention à monopoliser le verbe de celles qui ont l’outrecuidance de ne pas coder leur révolte dans la langue de la monarchie juridique. Pareille boursouflure nous est apparue symptomatique d’un droit incapable d’envisager un non-droit si ce n’est à travers les oripeaux d’un non-dit. En ressortait la nécessité, pensait-on, de ne pas imposer, à ceux qui parlent, le découpage éthique d’un rôle prédéterminé et invariant. Ensuite, il convenait de rappeler qu’un chanteur condamné pour avoir causé la mort de sa compagne ne pouvait il y a quelques années faire la couverture d’un magazine culturel. L’homme séparé de l’artiste… la femme de la victime… le droit du non-droit… le dit du non-dit.

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«L’organe crée la fonction» : Darwin, le parquet et les grenouilles

Il fut un temps où le transformisme était une explication de l’évolution du vivant. Sans le truchement d’Adam et Eve et sans plan global divin, Darwin, ses prédécesseurs (Lamarck !) et ses thuriféraires appréhendèrent le monde à travers la sélection des caractères permettant à une espèce de s’adapter à son environnement. On connaît le retentissement de ses travaux dans la société victorienne puis en Europe. Vouloir percer les secrets du vivant avait de quoi échauder une population encore fortement croyante. Le procès d’intention naguère fait à Darwin était d’autant plus injuste qu’il ne se considérait pas comme athée…

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